samedi 11 novembre 2017

Aiguille Déplasse - SW (Gorges d'Héric - Caroux)


Les Viallat, Déplasse, Godefroy et Epaule du Rieutort trônent fièrement au dessus des profondes Gordes d'Héric. La Déplasse est l'aiguille du quartier qui a le "plus de gueule". Et c'est rien de le dire.

Sauvage, aventureux et néanmoins très abordable. L'escalade au Caroux, en dépit d'un topo tout récent qui de prime abord au moins donne envie d'y (re)faire un tour et d'un plan de rééquipement (plus précisément plan de réorganisation des équipements  : des zones terrain d'aventure véritables, du terrain d'aventure partiel et un peu d'itinéraires sportifs; réhabilitation des "pistes" c'est à dire des sentiers "montagne") consubstantiel au topo susnommé, l'escalade au Caroux disais-je, demeure une escalade périphérique. 

Loin des standards actuels, loin des pôles, loin de la médiatisation, loin de là où tout se passe. C'est de la montagne mais ça n'en a à l'évidence pas l'aura, c'est pas les Alpes, pas même les Pyrénées (c'est dire comme c'est vraiment un trou et combien on ne pourra pas à son retour s'enorgueillir des ascensions réalisées), trop long pour que ce soit accessible mais pas assez pour ce que ce soit vraiment d'ampleur, à l'image trop facile pour que ce soit vraiment sexy, en même temps pas du tout clé en main donc pas du tout consommable et pas assez exotique pour que ça mérite un voyage. Bref, ce Caroux a tout pour être un peu méprisé par la planète montagne. Même pas l'énergie de franchement le mépriser, l'indifférence est moins coûteuse.

Et bien, force est de constater qu'une ascension de cette belle Aiguille Déplasse par son instantanément -à peine entrés dans les gorges- attirante arête SW a de sérieuses chances de convaincre même les plus sceptiques. Un petit bijou de l'escalade aventureuse très facile.  Un rocher splendide, une superbe ambiance, un environnement magnifique et un esprit véritablement aventure qu'en grimpeur tout terrain pourtant averti on se surprendrait  presque à redécouvrir.

Rien en place. Sinon de très très rares (7 sur 250m d'escalade) et souvent inutiles pitons. Un vieux spit tout rouillé au milieu de nulle part, laissé probablement là en qualité de témoignage d'une époque (?) et des goujons plantés là un temps, désormais enfoncés et inutilisables là où on imagine les relais historiques et/ou usuels. Bref, on choisit son itinéraire au gré des envies et des possibilités de protection qui ne sont pas non plus omniprésentes bien que régulières. Tout ça dans du 3+, parfois 4-, exceptionnellement du 4. 

Que dire de l'approche ? Rien de fou mais ça demande déjà des compétences certaines en orientation, un peu de flair et de discernement. Pour qui a le goût de ce genre d'aventure tout en modestie, le temps passé dans le maquis de chêne verts, le long de ravins bien raides et autres vires de chèvres (de mouflons!), sera déjà un ravissement ! 

De l'alpinisme Pagnolesque.

Aiguille Déplasse Arête SW (Caroux)
250m d'escalade 4 maxi et obligatoire
rien en place ou presque

Le topo récent donne l'impression de ne pas être très précis sur le matériel à prévoir. Il y est systématiquement conseillé d'emporter un jeu de friends du 0,3 au 3 et un jeu de cablés + quelques sangles quelle que soit la voie dans tout le massif ... J'ai des doutes... J'imagine qu'il faut plus parfois et moins doit suffire dans les voie "TA partiel"... Mèfi !

A mon goût, ici, avec un jeu complet de friends du 0,3 au 3 et 4-5 sangles dont 1 ou 2 de 180, on est pas loin de se protéger au maximum de ce que le caillou permet. A mon humble avis, les cablés se prêtent moins bien au jeu mais le cas échéant, ils pourront venir compléter un jeu de friends incomplet. C'est plus confort d'avoir 50m de corde si on systématise une progression en "tapant des longueurs". Sinon 30 suffiront ! Pas besoin de deux brins pour peu qu'on ait des dégaines et autres sangles pour rallonger les points qui de toute façon ne sont pas si nombreux...

C'est à l'évidence un terrain dans lequel on sera d'autant plus efficace et rapide qu'on jonglera avec toute la palette de techniques à dispositions pour s'assurer : assurage sur/derrière becquets, assurage sur soi, progression en corde tendue, ...










vendredi 10 novembre 2017

Fleur de Rocaille (Mouriès)

Euh ... y'a des prises là où je suis passé !?

Pas une découverte à proprement parler puisque j'y avais déjà posé les pieds et les chaussons (encore plus approximativement que maintenant ...) gamin au tout début des années 90. Le coin, ces lames de calcaires, les oliviers, la pinède, la garrigue, le mistral, LA praire, pas grand chose n'a changé. Presque comme dans mes souvenirs vivaces mais dois-je avouer confus. Par contre, 25 ans plus tard, il ne s'agit plus seulement de jouer et de se délecter de ces espaces lumineux de mon enfance mais de se confronter aussi à un pan de l'histoire de l'activité qui fait mon bonheur depuis si longtemps. Retourner à Mouriès, ça n'était pas "prémédité". Mais ça faisait longtemps que l'envie me trottait dans la tête. A l'occasion. A l'occasion seulement. C'est toujours bien plus confortable de laisser le hasard décider à votre place quand au fond, on craint que ça soit douloureux. 

L'occasion se présenta tranquillement, sans fracas, sans prévenir et sans me surprendre pour autant. Soit, allons donc voir où nous en sommes. Moi. Et le "sport" escalade en 2017 à vrai dire. 

Aucun doute, j'y suis. Dès la marche d'approche, j'hume le parfum de ces lieux qui, s'ils ont été abandonnés parfois par la pratique, demeurent éternels dans les esprits. Un parfum de rocher impeccablement compact, de parois à l'esthétique remarquable et de broches "Brouet-Badré" un peu espacées ...

15m maxi. Probablement même pas plus de 12. C'est à la louche la hauteur de ce mythe. Là encore, comme pour nombre d'autres vieilles voies qui restent dans les mémoires, ces 12 mètres de caillou parfait et de reliefs invitant à l'escalade suffisent amplement là où dans nombre d'escalades récentes,  12 mètres ne parviennent parfois même pas à satisfaire nos désirs d'approche accueillante. 12 mètres seulement. Et pas la moindre complaisance concédée au grimpeur aux prises avec la gravité. Et néanmoins, quel plaisir dans cette exigence. Simple, brute, sobre. 

Fleur de rocaille n'est probablement pas la plus belle voie de Mouriès. J'imagine que d'autres "classiques" (Ceux qui vont mourir te saluent,  Tranche de vie, ... ) ont objectivement plus d'atouts selon les canons de beauté communément acceptés parce que plus longues, plus homogènes et plus continues, dans des murs à l'élan plus remarquable encore. Sans doute. Mais Fleur de rocaille demeure un monument de notre petite activité qui en plus d'être d'un point de vue strictement sportif très intéressant (préhensions superbes, mouvements top, variés et qui demandent précision, rythme, ...  effort intéressant aussi physiquement que psychologiquement : faut arriver frais -et donc bien calé - à la décontraction au pied du crux torride juste quelques mètres sous la chaine) ajoute à l'expérience de son ascension une consistance, une épaisseur encore plus palpable.  

Mouriès et peut être plus spécifiquement Fleur de rocaille est un "lieu de mémoire" (j'y vais fort, je sais) d'une histoire de l'escalade sportive qui engage autant des considérations sportives que politiques et philosophiques.

Premier 8a féminin mondial avec l'ascension de Catherine Destivelle en 1985, décoté immédiatement à 7c (...). Remonté à 7c+. 7c+ le plus 8a des Alpilles aux dires de l'actuel topo. Considéré 7c, 7c+ ou 8a au bon vouloir de chacun. Chacun faisant avec sa conscience et son ego.

"L'inexactitude par définition" imposée au désir de mesure de la performance. Puissent les cotations faire  éternellement débat et que demeure cette incroyable poésie.  

Euh, oui, il y a plus grave dans le monde. Certes, certes.








Chorégraphie


Les doutes, les interrogations et les errances parfois fertiles et enthousiasmantes mais toujours stimulantes du travail de voie ... avant l'exécution d'une solution chorégraphique, partagée, discutée, confrontée mais au final bien personnelle.