On avait dit progressif... Dièdre des rappels ou Orni (court et pas trop dur mais qui met bien dans l'ambiance !) puis Y-Z au Teillon (pas trop dur a priori, plus équipé en pitons et plus long)...
Et bien si dans le Dièdre des rappels, ça a presque déroulé pour la première de Pat au Verdon, il en aura été autrement au Teillon !
Le Y est chose sérieuse. Et la première longueur donne de suite le ton : c'est raide (léger dévers tout le long), il y a des pitons (pas tous bons) et des lunules (pas toujours très grosses et sur cordelettes toutes pourries), il ne faut pas tirer ou charger toutes les prises et rajouter des coinceurs demandent un peu de métier et de continuité et de toute façon, on peut pas en mettre un tous les mètres : bref, ça grimpe ! Pour L2 (et L3 qui se couplent facilement si on prend pas mal de coinceurs pour une grande et belle longueur de 50m), deux options : celle qui faut prendre en tirant presque tout de suite à gauche au dessus de R1 (un piton visible et une cordelette) pour rejoindre la très belle fissure qu'on voit nettement et qui attire le regard depuis le bas, et celle qu'on a prise ... c'est à dire tout droit avant de traverser bien plus haut ... Et ben, c'est (bien) plus dur ! Et bien moins protégé/protégeable : on rajoute pas grande chose et les pitons en place et notamment le dernier avant la traversée exigeante (!!!) sont à aborder avec circonspection ! La suite est plus évidente. La longueur sous le rateau de chèvres est facile et le passage est splendide ! Vient L5 ... Deux beaux dièdres et leurs petits surplombs à passer dans un rocher excellent désormais et une ambiance aérienne amènent à une dalle compacte dont je suspecte qu'il faille la traverser avant de rejoindre la voie de Graou. Deux pitons (et un excellent totem cam) protègent les 7 premiers mètres et de jolis mouvement d'équilibres en dulf délicate dans une belle ambiance ... je me régale ! Il fait frais, ça colle, j'avance bien, grisé par l'escalade ... Transfert de poids un peu délicat et je me retrouve sur une marche qui laisse la place pour mon pied droit et que je peux envisager de partager avec mon pied gauche via quelques plus ou moins subtils changements de pieds... Je relève la tête et là où j'aurais juré tomber sur un piton caché derrière une touffe ou au creux d'un mini-dièdre, je ne vois plus rien, pas de piton à l'horizon. Ca m'interpelle : jusque là, les pitons, certes, pas toujours bons et souvent espacés, ont toujours au moins jalonnés l'itinéraire et une dalle comme celle-là, dans une vieille voie comme celle là est toujours protégée par quelques pitons ... J'avance, on verra bien ... Sauf que je ne verrais jamais rien. Et que 6-7 mètres au dessus du dernier piton, je ne vois ni comment me protéger ni comment passer en étant certain que je ne me la collerai pas (ça donne pas du tout envie de se la coller et de revenir à mac 12 dans le dièdre d'en dessous !!!) ... je comprends pas ... je cherche où planter peut être un petit cablé ou un totem 0,3 ... Rien. Je tente en équilibre et en vain, de gratter deux trous proches en espérant voir surgir une lunule énorme ... mais rien ! Je m'essaie à poursuivre un peu la traversée 1,5m ... 2m ... Il me reste 5m et c'est bon. y - 5m : la situation dans laquelle je suis a vraiment tout d'une équation ! Un coup d'oeil à ce dans quoi je m'engagerais si je poursuivais dans cette direction et un autre à la perspective du dièdre en dessous finissent à me convaincre de revenir sur mes pas prudemment... je comprends pas.
Après quelques tergiversations et de nombreux maugréements puis une observation la plus fine et lucide possible du terrain, je m'arrêterai là. Moyennant une désescalade en mode "qu'est-ce que je fous là ? oui c'est sûr mais reste concentré " et un peu de bricolage, j'entame ma réchappe sur l'avant dernier piton que je préfère largement à son suivant ...
Je retrouve le compagnon de cordée, le Soleil et le sourire 25m plus bas tandis que je laisse deux mousquetons, un mètre cinquante de ficelou et un peu de mon orgueil.
Ca fait très longtemps que j'avais pas pris de but ...
Et bein, voilà : ça fait un excellent sujet de conversations amusées et quand même beaucoup moins mal que de s'éclater dans un dièdre 15m plus bas !
Et au fait, la voie du Y est une bien belle pièce d'escalade historique, restée aventureuse et sauvage !
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